Critique du PDG de Lufthansa
Protection du climat dans l'UE
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D'abord technique : il existe des plans concrets de l'UE, selon lesquels, à partir de 2025, le carburant des avions devra contenir au moins deux pour cent de carburant durable, ce que l'on appelle les Sustainable Aviation Fuels (SAF). À partir de 2030, un quota partiel d'au moins 1,2 % de carburants synthétiques (e-carburants) devra également être respecté. Les deux quotas augmenteront par paliers de cinq ans pour atteindre 70 % de SAF et 35 % d'e-carburants d'ici 2050. L'initiative doit encore être confirmée par la plénière parlementaire et le Conseil des ministres de l'UE.
Le grand patron de Lufthansa, Carsten Spohr, a récemment réagi vivement à cette décision. Il n'est pas opposé à l'initiative elle-même, mais dans un discours récent, il a mis le doigt sur le problème : cette règle n'est pas neutre sur le plan de la concurrence. En d'autres termes, elle perturbe les "règles du jeu équitables" dans le secteur de l'aviation - pour autant qu'elles aient jamais existé.
Spohr se plaint que les compagnies aériennes non européennes n'auront pas à se ravitailler en carburant renouvelable - et coûteux - dans leurs plates-formes. Cela rendrait les billets des compagnies aériennes européennes comparativement plus chers, car aucune compagnie ne pourrait compenser ce coût supplémentaire. Le patron de LH explique qu'il est donc plus probable que les passagers préfèrent les correspondances en dehors de l'Europe, car les billets d'avion sont moins chers même si l'on accepte de faire des détours.
"En fin de compte, cela signifie que : En l'état actuel des choses, ces réglementations européennes entraînent un déplacement des émissions de CO2. Et en même temps, elles fonctionnent comme un programme de subventions pour les compagnies aériennes en dehors de l'Europe, qui ont également des normes environnementales et sociales bien moins bonnes", a déclaré le chef de LH. C'est mauvais à la fois pour l'économie et pour le climat. "La politique doit contribuer à empêcher cela. À Bruxelles, à Berlin et dans les autres capitales européennes", a expliqué M. Spohr.
Comme d'habitude, les propos de M. Spohr sont logiques. En même temps, cela témoigne de la complexité de l'histoire du développement durable. Un fait incontestable est sous-jacent à ce genre d'argumentation : le débat sur le climat est une histoire planétaire, tandis que l'humanité s'est organisée en unités plus petites, en concurrence - et pas toujours en communication - les unes avec les autres dans pratiquement tous les domaines.
L'égoïsme et la concurrence constituent le principal obstacle au développement durable. On remarque le réflexe égoïste un peu partout : dès que les exigences en matière de durabilité se heurtent aux habitudes et aux réalisations d'individus ou de groupes ayant un intérêt commun, les talons s'enfoncent.
En fait, la concurrence est une forme (le plus souvent) polie d'égoïsme : une partie veut faire mieux que l'autre, généralement en termes de produit, de service ou de prix. Si une partie joue à fond la carte de la durabilité, cela peut donner un avantage temporaire à une autre partie, à un concurrent.
La solution à ce problème réside bien sûr dans une compréhension et une conviction globales qu'avec les pratiques d'aujourd'hui, nous sommes en train de livrer aux Philistins notre propre capacité à vivre sur la planète. Mais de nombreux exemples montrent qu'une telle prise de conscience n'est pas encore pour demain. En réduisant le nombre maximum de passagers autorisés, Schiphol a un effet de levier sur les aéroports environnants. Alors que le mouvement "voler moins" prend de l'ampleur en Europe, 30 nouveaux aéroports seront construits en Inde l'année prochaine. Les grandes compagnies aériennes remplacent leur flotte par des appareils moins polluants en termes d'émissions de CO2, mais les "vieux" appareils continuent de voler dans d'autres parties du monde, avec d'autres compagnies aériennes. En Belgique, les touristes se rendent courageusement au supermarché avec des sacs réutilisables, mais en vacances, ils laissent sur les plages des amas de débris plastiques qui doivent être nettoyés par des camions tous les matins.
Le PDG de Lufthansa défend évidemment les intérêts de sa compagnie, tout en soulignant un point important : seule une coopération sans précédent en matière de planification et d'exécution nous permettra d'adopter une approche plus durable dans le monde entier.
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